Extrait du Registre des baptêmes, des mariages et des sépultures de la paroisse Ste-Foy de Québec dans lequel le mariage entre Nicolas Real dit Vilmer et de Marie-Anne Galarnaud est enregistré1.
Mon ancêtre “Nicolas Real dit Vilmer” arrivé au Canada en 1724
Ferdinand Villemaire
Nous ignorons les véritables raisons qui ont poussé Nicolas Real dit Vilmer (1697-1755), mon ancêtre, à quitter son coin de pays (la ville de Waremme dans la région de Liège se trouve maintenant en Belgique, mais elle faisait partie de la France en 1724) pour émigrer seul dans un monde nouveau et inconnu : en l’occurrence, le Canada. Mais, à partir de certains faits historiques, j’ai osé imaginer une histoire possible qui, à défaut d’être véridique ou historiquement vérifiable, nous donne un aperçu de la situation qui régnait dans la société où il vivait et ce qui l’a poussé à tout quitter pour repartir à zéro.
“Le coin de pays où vivait Nicolas Real dit Vilmer n’avait pas de frontière naturelle, ce qui empêchait les habitants de la place de se protéger adéquatement contre d’éventuels envahisseurs. Par conséquent, au début du 18e siècle, sa région, celle de Liège qui fait maintenant partie de la Belgique, est dévastée par une vague guerre dans laquelle les Anglais supportaient les Allemands qui contrôlaient alors les Pays-Bas, le pays limitrophe situé immédiatement au nord. Les Allemands essayaient de conquérir ce territoire des mains des Français qui en avaient déjà plein les bras avec leur guerre contre l’Espagne et qui, en plus, étaient financièrement ruinés. En 1713, le Traité d’Utrecht met fin à cette guerre Espagne-France et toute la région entre les rivières Escaut et Meuse où vivait Nicolas, fut placée étonnamment sous la gouverne de l’Autriche. Très éloignés de cette zone et plus intéressés à valser jusqu’au petit matin, les Autrichiens n’en avaient que faire! Ceci a eu pour effet pervers de laisser cette contrée à la convoitise des Anglais, des Allemands et même des Norvégiens qui y envoyaient régulièrement leurs armées piller et saccager la région à volonté. En 1830, quand les habitants de cette contrée en ont eu assez, ils ont créé leur propre pays qu’ils ont appelé la “Belgique” et ont conquis leur indépendance en 1839. C’est alors qu’ils ont défendu leurs frontières eux-mêmes. Mais ceci arriva bien après que Nicolas fut parti pour le Nouveau Monde qu’on appelait alors l’Amérique, en 1724 (la date exacte de son arrivée dans la ville de Québec est inconnue à ce jour)”.
Les explications écrites ci-dessus sont mises entre guillemets et en italique pour rappeler au lecteur que ce qui y est présenté n’a pas réellement de valeur historique; c’est uniquement le fruit de l’imagination de l’auteur pour tenter d’expliquer les raisons qui ont motivé mon ancêtre à venir s’établir en Amérique.
En arrivant au Canada, Nicolas, très malade, a dû être hospitalisé à l’hôpital “Hôtel-Dieu” de Québec (dans le “Registre journalier des malades de l’Hôtel-Dieu de Québec”, Nicolas Vilmer, 22 ans, de Liège, est inscrit à titre de malade en date du 11 août 1725). Une fois guéri, il est devenu brancardier pour l’hôpital et il s’est alors établi dans la ville de Québec. Il y rencontra Marie-Anne Galarnaud (1708-1765?) avec qui il s’est marié le 4 octobre 1726 à l’église de Sainte-Foy de Québec.
Il est important de remarquer que les quatre (4) premiers enfants du couple Nicolas/Marie-Anne sont nés dans la ville de Québec (en 1727, 1730, 1732 et 1733) et que tous les quatre sont décédés en bas âge, c'est-à-dire avant la fin de l’année 1733. Est-ce dû aux deux hivers extrêmement rigoureux de 1728 et 1729 pendant lesquels "une immense quantité de neige est tombée" (dixit plusieurs historiens) ? Ou à l’épidémie de picote (varicelle) qui a décimé la population de la ville de Québec en 1729-30 ? Ou peut-être à la disette générale qui a sévi dans le pays en 1729-30-31 et durant laquelle la population ne mangeait que "des patates et des bourgeons", faute de mieux (à l’automne 1733, il n’y avait pas assez de vivres à Québec pour que la population survive jusqu’à la prochaine récolte). De plus, en 1734, le chemin entre Québec et Montréal est terminé et on peut se rendre à Montréal par la terre ferme (M. De Boisclerc fut le premier à faire le trajet en voiture). Il semblerait donc que les conditions de vie misérables que Nicolas espérait laisser dans son pays d’origine l’ont rejoint en Amérique !
Quoi qu'il en soit, le cinquième enfant (prénommé : Nicolas-Noël) que le couple Nicolas/Marie-Anne a eu, est né en 1734 à Terrebonne, bourgade située juste au nord de Montréal, au Québec. Cet enfant a été suivi de neuf (9) autres dont sept (7) ont survécu plusieurs années et sont à l’origine des lignées de Villemaire vivant actuellement en Amérique du Nord, les voici :
Le premier survivant:
Nicolas-Noël Real-Drouard dit Vilmer (1734-1798?) voyageur, s’est marié le 16 novembre 1761 avec Angélique Racette (1745-1830) en l’église St-Charles de Lachenaie au Québec. Ils sont à l’origine des Villemaire de a) la grande région des Laurentides et de Montréal au Québec, b) de l’Ontario, c) de l’ouest du Canada, d) de la Floride aux États-Unis, e) de la Nouvelle-Angleterre aux États-Unis, f) de la Californie aux États-Unis, et g) de la lignée qui a mené à l’auteur de cet article. L’ajout du patronyme “Drouard” à celui de “Real” est surprenant et ces deux appellations ont disparu après la troisième génération (quoiqu’elles sont réapparues quelquefois par la suite, de manière ponctuelle).
La deuxième :
Agnès Vilmer (1735-1771) s’est mariée le 4 février 1765 à Lachenaie au Québec avec François Magnan (1719-1788). Ils sont à l’origine de certaines des familles de Magnan du Canada.
Le troisième :
Pierre Vilmer (1737-1823) s’est marié avec Françoise Catudal dite St-Jean (1739-1815) à l’église St-Mathias à Chambly au Québec. Ils sont à l’origine des Villemaire de la région de Belœil, de Chambly et de St-Jean-Baptiste-de-Rouville, au Québec.
Le quatrième :
Antoine Real-Drouard dit Vilmer (1741- ). Ses descendants n’ont pas été retracés.
Le cinquième :
Jean-Baptiste Vilmer (1743-1812) s’est marié avec Marie-Josephte Jouber (1749-1810) le 10 août 1767 à Châteauguay au Québec. Leurs descendants n’ont pas été retracés.
La sixième :
Marie-Anne Vilmer (1745-1819) s’est mariée avec Jacques L’Huissier (1720-1788) à Verchères, au Québec, le 2 février 1767. Elle est à l’origine de certaines familles portant les noms de Lussier et Lucier.
La septième :
Geneviève Vilmer (1747-1813) s’est mariée le 4 août 1766 avec Jacques Catudal dit St-Jean (1735-1790) à Chambly au Québec. Elle est probablement à l’origine des Catudal de la région de Beloeil, au Québec.
Plusieurs se demandent ce que signifient le nom “Real” et le surnom “dit Vilmer” qui identifiaient notre ancêtre à son arrivée au Canada. Certains ont avancé que “Real” pourrait signifier qu’il était peut-être d’ascendance noble. Cette explication est à notre avis peu plausible puisqu’il venait d’une région très peu considérée par la monarchie française. Par ailleurs, nous savons aujourd’hui que beaucoup de pionniers français du 17e et 18e siècles ont porté ou ont reçu des surnoms découlant de leurs origines, de leurs métiers, de la teinte de leur peau ou la couleur de leurs cheveux, de leurs défauts physiques ou intellectuels ou enfin de leur tempérament ou leur richesse. Ceci ne semble pas être le cas de notre ancêtre puisque la région d’où il venait est située à l’intérieur des terres et qu’il n’a jamais uni sa destinée à la mer ou à ses fruits. En somme, il est bien difficile de trouver une explication valable pour expliquer l’origine du nom “Real dit Vilmer” dont notre ancêtre était affublé. D’ailleurs, les Villemaire ont délaissé cette appellation d’origine très tôt pour ne garder que le patronyme qui nous identifie encore aujourd’hui.
Il est intéressant de noter ici que les Villemaire vivant actuellement en Amérique du Nord ont un seul et même ancêtre commun : Nicolas Real dit Vilmer. Ce phénomène est assez rare en Amérique pour ceux dont les ancêtres sont arrivés il y a quelque 300 ans et plus.
Aujourd’hui, les Villemaire ont suivi les traces de Nicolas, leur ancêtre, et ont réalisé son but, c'est-à-dire vivre en Amérique dans un état de droit où tous les rêves sont permis et réalisables.
1. Il se lit comme suit :
« Le 4 octobre de la présente année 1726 après la publication des trois bancs de mariage faits aux messes de paroisse de Notre Dame de Foy pendant trois dimanche consécutifs entre Nicolas Real fils du defunct Pierre Real et de Marguerite Dupens ses père et mère de la paroisse de Waremme évêché de Liège d’une part et de Marie-Anne Galarnaud fille de Jacques Galarnaud et de Marguerite Panneton ses père et mère de la paroisse de Ste-Foy d’autre part, ne s’étant trouvé aucun empechement au dit mariage les ay mariés et donné la bénédiction nuptiale selon la forme de notre mère la Ste-Église en présence de Joseph Lafleur, de Guillaume Malouin, de Jules Roy, de Jacque Galarnaud père de l’épouse, de (ILLISIBLE) Marinier, de (ILLISIBLE) Noel, parents et amis, lesquels témoins ont déclaré ne savoir signer, les autres ont signé conjointement avec nous
Jacque Galarnaud
Pierre Gabriel LePrévost, ptre »
FamilySearch - microfilms consultés entre 1988 et 2010 à la bibliothèque de "l'Église-de-Jésus-Christ-des-Saints-des-Derniers-Jours" située sur la rue Delorimier à Montréal.
VILLEMAIRE, Ferdinand. 2012. Généalogie des Vilmer-Villemaire de l'Amérique du Nord, 321 p. Consultable aux Archives du Canada à Gatineau ainsi qu'à BAnQ à la Grande Bibliothèque de Montréal.